Chambéry, ville d’art
et d’histoire, cela fait trente ans que la ville possède ce label. C’était aussi
le thème retenu par l’Associationdes Journalistes du Patrimoine et Chambéry Tourisme & Congrès ,
mi juin dernier sous un soleil paisible. Savoie, Haute-Savoie, de belles régions
de France où flotte un subtil parfum d’Italie. A Chambéry, l’histoire se lit à
chaque coin de rue. S’y mêle aussi tout le charme que recèle la Cité des Ducs
de Savoie. Balade informelle au gré de notre fantaisie.
La fontaine des éléphants
Fontaine des éléphants - Photo G.Garofino |
D’autres éléphants dans notre pays de cocagne ? Souvenir
d’un éléphant de la mémoire à Lille sous la municipalité de Pierre Mauroy. Construit en
1989 pour le bicentenaire de la Révolution française, ce monstre de 13 m de
haut, 11 m de long, 4,30 m de large, doté d’une salle de projection de 20
places, avait coûté un peu plus de 7 millions de Francs, plus d’un million
d’euros, avant de tomber dans l’oubli, paradoxe pour un éléphant de la mémoire,
et d’être stocké en pays minier d’Arenberg bien loin des lampions et fastes
révolutionnaires de la Capitale des Flandres. Aux dernières nouvelles, le
paisible animal qui aurait pu connaitre le même sort que la fontaine de
Napoléon à la Bastille l’aura échappé belle. Cédé au franc symbolique, il avait
été racheté à l’euro plus symbolique encore...
Autre éléphant, celui d’un autre de nos anciens premiers
ministres, Jean-Marc Ayrault, dans sa bonne ville de Nantes où l’on connait, de
Folles Journées et où naquit Jules
Verne, passionné des contrées lointaines et de voyages extraordinaires. Ici l’imposant
animal dont les dimensions avoisinent celles de l’éléphant lillois pour un
poids de près de 50 tonnes, se meut par un mécanisme savant composé d’une
soixantaine de vérins. Il y a du génie et
un talent de poids dans ce pachyderme là et cela ne trompe pas. A voir sans faute.
A Chambéry, la fontaine des éléphants rend hommage à Benoit Leborgne, comte de Boigne
(1751-1830), enfant de la cité, militaire et grand voyageur notamment en Inde (où
l’éléphant est plus fréquent que l’ours polaire), il reviendra s’installer à
Chambéry, fortune faîte, consacrant une partie de celle-ci à l’embellissement
de sa ville (Construction d’un théâtre, percement de la rue qui porte
aujourd’hui son nom) mais aussi à des œuvres charitables en faveur des plus
démunis. Les Chambériens, sont fiers de leur fontaine et il est probable que
lorsque vous vous arrêterez un instant pour la photographier, l’un de ces
placides animaux en barrira de plaisir. Formée par quatre demi éléphants sur
quatre faces d’un carré, la fontaine est parfois nommée des « Quatre sans culs » mais ça,
ne le répétez pas si vous ne voulez pas voir le général de Boigne descendre de
sa colonne.
Le château des Ducs de Savoie et la Sainte-Chapelle
la Sainte-Chapelle - Photo : Gérard Conreur |
La Sainte-Chapelle
est ainsi nommée en juin 1502, parce qu’elle va devenir l’écrin d’une relique
qui bouleverse la chrétienté : le Saint-Suaire
dont le duc Louis 1er de Savoie, prince de Piémont, comte d’Aoste et
de Maurienne (1413-1465) et son épouse Anne de Lusignan (1419-1462) avaient
fait l’acquisition en 1453 auprès de Marguerite de Charny, en échange du
Château de Varambon, dans les environs de Bourg-en-Bresse. Le prix est donc astronomique.
L’histoire du Saint-Suaire est truffée de rebondissements. On ne sait comment il
est parvenu en Europe mais son existence est relatée dès le XIII° siècle,
époque à laquelle ce suaire de drap blanc de 4,30m sur 1,10m de large est déjà
la propriété de la famille de Charny.
Ce drap mortuaire qui aurait servi à envelopper le corps du
Christ lors de sa mise au tombeau et porte l’image sépia d’un homme ayant subi
le supplice de la crucifixion, échappera de justesse à l’incendie de la
chapelle dans la nuit du 3 au 4 décembre 1532. Il y a doute sur la relique car depuis
le Moyen Age les « Saint-Suaires » sont légions en Europe et au
Proche Orient, on en compte une bonne quarantaine ! En France, le plus
célèbre est celui de Compiègne mais on en trouve également à Cahors, Reims,
Besançon, Carcassonne… A Rome, trois Saint-Suaires existent. Aix-la-Chapelle en
possède deux.
Après l’incendie, le saint-suaire, propriété personnelle des
Ducs de Savoie va quitter la Sainte-Chapelle au terme d’une nouvelle
mésaventure. En 1578, l’archevêque de Milan pour sauver sa ville de la peste
fait le vœu de venir à pied jusqu’à Chambéry pour se recueillir devant le
saint-suaire mais tombé malade, il s’arrête à Turin. Le duc Emmanuel-Philibert
pour lui éviter de nouvelles fatigues fera déplacer la relique jusqu’à lui à
Turin, ville que la relique ne quittera plus au grand dam des Chambériens dont
seules désormais les prières pourraient faire un miracle ?
Après la mort d’Umberto II, dernier roi d’Italie en 1983, et
par testament la relique devient propriété de l’Eglise. Cinq ans plus tard, en
1988, une datation au carbone 14 permet d’évaluer que la confection du tissu se
situerait entre 1260 et 1390 …après Jésus-Christ.
Est-ce à dire pour autant que le Saint-Suaire a livré tous
ses secrets ?
Le Château de Candie
Notre brève promenade à Chambéry se termine déjà. La
fontaine des éléphants retrouve son lustre d’antan sous l’œil attentif du
Général de Boigne qui du haut de sa colonne surveille les travaux dans un
silence approbateur, son regard parfois se perd du côté du Château des Ducs de
Savoie et de la Sainte-Chapelle.
Pendant que nous sommes toujours au cœur de la
ville, le Musée des Beaux-Arts nous invite à la prodigieuse exposition Rois & Mécènes, Turin 1730-1750, la cour de Savoie et les formes du rococo. Avoir jusqu’au 24 août prochain.
Le "ciel" de la rotonde de Chambéry - Ph. Gérard Conreur |
Mais tout cela nous a creusé l’appétit et toujours un peu
plus loin, un peu plus haut tandis que nous laissons à regret Chambéry derrière
nous, voici qu’apparaît le Château deCandie. Qui dit « château » dit « Histoire » mais cette
fois, nous ne remonterons pas jusqu’en 1344 où il appartenait déjà à la famille
Candie dont il tire avec orgueil son nom. L’histoire commence pour nous en 1990
lorsque Didier Lhostis, créateur de la maroquinerie
Didier Lamarthe, passionné et collectionneur d’antiquités tombe amoureux de
cette ancienne Maison forte dont il se porte acquéreur aussitôt.
Le Château de Candie - Photo : Wooloomooloo |
Pendant quatre
ans, il va mener ici des travaux spectaculaires et le mot est faible pour
transformer le château en un magnifique hôtel restaurant. Il soignera la
décoration et trouvera en ce lieu une place idéale pour chacun de ses beaux
meubles et bibelots. Le résultat, j’en témoigne, est somptueux mais les travaux
se poursuivent, les granges sont transformées en 1999, une piscine extérieure
est aménagée l’année suivante. En juin 2006, pour Didier Lhostis, l’heure est
venue de passer à autre chose, peut-être un autre défi ?
En février 2014,
Cédric Campanella et son épouse Mariétou, tous deux anciens salariés de
l’établissement prennent possession du lieu écrivant ainsi une nouvelle page du
Château de Candie. Vous rêvez d’une table raffinée dans un cadre élégant ?
Ne cherchez plus.
Gérard Conreur – Juin 2015
A voir aussi à Chambéry et ses environs : La Maison de la vigne et du vin à Apremont. Remerciements à l’association La Manivelle pour une promenade en véhicules anciens. La région de Chambéry est riche en produits de
la table, notamment les
fromages de Savoie mais pas seulement. Produits de tradition et de qualité,
nous y reviendrons. Je voudrais citer trop rapidement malheureusement la Distillerie des Alpes, la Maison Dolin fondée
en 1815 (eh oui, Waterloo cette année-là) et la Brasserie du Mont Blanc. Pardon
à ceux que j’oublie. Merci enfin à Gérard Charpin de Chambéry Tourisme &
Congrès.
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